Contribution de Gervais, Alfortville
Chacun vivait dans son coin. Vous avez pris racine ou quoi ? Vous là, dans le premier coin, qu’est-ce que vous faites ?
Oh, eh bien moi, j’attends sans bouger, surtout sans penser, je rumine – oui, je sais, c’est vache, mais j’ai peur de faire quelque chose. Alors, l’immobilité corporelle finira bien par me donner un ulcère, à force de penser qu’on va tous crever. Et là, ça m’occupera : j’aurai enfin une raison de vivre – et d’être malade…
Moi, dans le deuxième coin, je m’informe 24h sur 24. Il faut absolument tenir le compte des contaminés, des hospitalisés, des morts, au jour le jour ! C’est tellement drôle ! On comptabilise, on additionne, on compare. Tiens, l’Italie tient la corde devant l’Espagne, mais les Etats-Unis remontent… Qui va gagner le plus de défunts ?
Moi, dans le troisième coin, je me dépense – comme je ne peux plus dépenser ! Je fais mon jogging quotidien dans mon joli body fluo super sexy, sinon je vais péter un câble. C’est vrai, quoi, décemment, on peut pas rester enfermée tout le temps, c’est pas bon pour la santé. Et puis, je dois m’entraîner pour le marathon de Paris.
Moi, dans le quatrième coin, je m’en fous, du confinement. Et si les flics me verbalisent, rien à battre : je suis pas solvable ! Et puis j’ai vingt ans. Leur truc, là, le corona, c’est les vieux que ça dézingue, pas les jeunes comme moi !
À force de s’angoisser, Coin N°1 a fait un infarctus. Hospitalisé aux urgences, il a contracté le virus. Son copain, Coin N°2, est allé lui rendre visite, mais son masque n’était pas étanche. Coin N°4 a dragué Mlle Coin N°3 et ils ont ainsi fait virus commun. Et c’est donc dans un bel hôpital, où ils n’étaient pas tout seuls, qu’ils ont pu jouer aux quatre coins sous leur respirateur.
Enfin ensemble !