Contribution de Marie via le Décaméron
Il m’est arrivé quelque chose d’incroyable, il y a un mois à peu près. J’ai rencontré un homme, une semaine avant le confinement. Nous sommes voisins. Nos trois premières rencontres, il les a décrites quand, en sortant du lit, il s’est exclamé avec un sourire à dérider un préfet : « C’était VOLCANIQUE ! » Quand il est parti la deuxième fois, je lui ai écrit, alors qu’il devait encore être dans l’immeuble, que je l’aimais bien et que je voulais le revoir. Il s’est gentiment moqué de moi. Le jour du discours de la quarantaine, l’envie de l’appeler a été plus forte que les tergiversations du trop tôt ou trop intense. Il a décroché, il a compris que mes petites vannes et mon ton faussement détaché n’arrivaient même pas à me convaincre moi-même que je ne luttais pas contre l’angoisse que nous sentions tous monter.
Il est arrivé au milieu du discours de Macron, avec une bouteille de vin et des chaussettes léopard. Je me suis extasiée sur le léopard, on a bu, on a ri, on s’est raconté nos vies, nos peurs et nos envies, et il m’a déclaré « Ok, défilé de chaussettes ! » Depuis, j’en fais des stickers et les lui envoie sur whatsapp quand il fait des réunions sur la grande table, avec ses collègues que je reconnais pendant que je gribouille sur la table basse. Il me dit qu’il a toujours rêvé d’avoir une collection de stickers de ses chaussettes, et ça me fait rire. Il y a les donuts, les frites, les œufs sur le plat, les oranges géométriques, les keith haring et les rouges écossaises. Il continue de me faire rire, on cuisine, il me passe sa musique, on regarde des vidéos de Eater, des conférences et des sketches des Inconnus. Il fait des jeux de mots avec mon nom de famille que je lui rends bien, et moi je crois que je suis tombée amoureuse de son énergie, de ses pieds et de tout ce qu’il y a au-dessus.
Il y a eu ces quelques heures pour sauter le pas, du lundi soir où nous avons trop bu jusqu’au mardi matin, et m’offrir par la contrainte la plus belle des cohabitations.