L’île au pou

Contribution de Yamna, via Encrelignes, Boissy-Saint-Léger

Chacun vivait dans son coin…
Dans une petite île très loin…

Des arbres merveilleux,
Des animaux monstrueux,
Des habitants silencieux,
Des géants avec leurs châteaux et leurs bateaux,
Des nains avec leurs tipis et un riz riquiqui.

Ils rient tous les deux… Nains et géants…
C’est l’illusion de la paix.
Chacun pour soi.

Jusqu’à l’arrivée d’un nuage flou.
Le nuage derrière la plage, c’est fou.

Derrière ce flou, il n’y a pas un loup,
Non ! Juste un pou tout mou.
Il est invisible, irrésistible,
Il pique, il tue, et se multiplie.

En quelques minutes, il devient visible :
Il croise ses jambes, fait son Yoga.
Il meurt et laisse la tâche aux invisibles.
Il vient de la mer et retourne à la mer.

Chaque soir, ils se réunissent autour du feu,
Les résidents comme le président.

En écoutant le bilan étouffant du journal oiseau,
J’ai des frissons.
Le bilan est inquiétant.
Les chiffres soufflent des solutions,
Comme des loupes et des jumelles.
Oubliant que le danger est invisible,
Un pou et non un loup.

Le pou choisit ses décès avec une élégante égalité.
Le sud comme le nord, homme et femme,
Le rouge comme le bleu, riche et pauvre,
L’espion comme le serpent…

Pour ces résidents résistants,
Au lieu de la panique, s’organisent des pique-niques.
Au lieu de l’angoisse, ils se croisent dans une croissanterie,
Pour une simple conversation.
Chaque soir, ils se réunissent autour du feu.

Après la réunion polie des politiciens,
La bienveillance des surveillants de la santé,
Les compliments des compétents,
Et toute cette mascarade…

Le président présente son discours.

« Chères résidentes, chers résidents,
Hier, dans notre île,
Régnait la mafia des malfaiteurs.
Demain peut-être la mort,
La fin pour nous tous…

Chères résidentes, chers résidents,
Il est temps de réagir.

Gommons ensemble
La ligne imaginaire entre géants et nains,
Sur la table comme sur le sable !

Mélangeons les filles, les garçons,
Les géants, les nains,
Et toutes les couleurs,
Dans nos écoles, vos écoles !

Unifions immédiatement toutes les religions,
Dans la même salle de danse,
En respectant leurs mouvements spirituels !
Et en urgence, créons un gigantesque couloir,
Avec le bar des athées et la salle de culte,
Pour faciliter les échanges et la liberté de déplacement
Entre les deux publics !
Donnons du travail
Et la proximité domicile-travail
Pour tous, dès demain !

Vive l’île !
Vive ses habitantes et ses habitants ! »

 

 

Merci à l’association encrelignes qui a fait vivre cette consigne malgré l’annulation forcée des ateliers !